Phil, l'escapade africaine

Pointe-Noire - Saturnin, ambiance de quartier

31/07/2015

De retour à Pointe-Noire, je retrouve Saturnin, mon ami cycliste "des pistes de sable" rencontré 2 mois plus tôt. Je l'attends avec mon vélo chargé à stock à la "station savon". Le bus m'a cette fois-ci évité 2 jours d'étape de montagne dans le Mayombe, une route que j'ai déjà sillonné. Évidemment, le moyen me dépose un arrêt trop loin... Du coup, on est obligés de rebrousser sur 10 kilomètres pour arriver chez lui, où il m'invite à passer la nuit. Blocs de béton, baraques de planches, vieilles carcasses de bagnoles pourries, le quartier tout entier est bâti sur le sable. Saturnin, ébéniste, toiturier et réparateur-vélo construit sa maison en planches non loin de là, avec de maigres moyens. Ici, c'est l'ambiance quartier-village où les 3 maisons alentours et toute la marmaille se retrouvent au coin du feu commun, préparant les repas, dansant parfois pour éviter la fraîcheur nocturne. Je fais comme tout l'monde: je me mets à tortiller du derrière, ce qui rend hilare toute la tribu des enfants. Sa femme partie en pèlerinage 3 jours pour l'église, Saturnin s'occupe de ses 3 gosses avec beaucoup d'attention. Après les spaghettis du matin, ce soir, il nous mijote le coco-poulet, histoire que je n'oublie pas le fameux plat national du Congo. Saturnin a le plaisir de m'accueillir à table, avec de belles assiettes, à l'européenne. Les enfants prennent leur repas par terre, à l'africaine, dans des gamelles. Normal. Personne ne s'en plaindra. C'est juste mon regard qui est bizarre. A mes yeux d'européen nanti, invité à table, l'Afrique manque de moyens. Toujours la même rengaine... Pourtant, je repense aussi aux paroles de ce sage monsieur qui me disait: "Les européens nous ont apporté la table. Depuis, tout le monde mange chez soi, alors qu'avant on mangeait tous autour du même plat, en commun. C'est comme cela que l'individualisme est arrivé. L'égoïsme progresse chez nous." On mange dans une des 2 pièces de cette maison en déménagement, au beau milieu d'un grand atelier vélo, ambiance vieilles jantes et pneus usés, frontales et lampe à pétrole, radio à piles en fond sonore. "L'électricité, c'est une affaire de luxe au Congo" me dit Saturnin. Et malgré l'insistance de la copine Lydia pour que je squatte le lit de la voisine esseulée, je dormirai seul dans cette pièce où l'on improvise un matelas avec un système D pour fixer la moustiquaire.