Phil, l'escapade africaine

Soqueco - prisonnier chez les flics

12/08/2015

6h30. Mes pneus filent déjà sur le bitume, fuyant cet endroit un rien pénible, en quête d'un petit déj'. Les camions filent comme des balles à plus de 100, à 2 mètres de mon cadre. Ça craint sérieusement. Près de 400 bornes pour un rendez-vous avec une chute d'eau que j'ai admiré en photo, revenir ensuite à la Cidade, je me dis parfois que mes trajectoires deviennent de plus en plus capricieuses. En haut d'une côte, un bras blanc me fait signe d'un 4X4 à l'arrêt... Surprise: c'est la "soeur général" d'hier soir qui me propose, sans doute pour se faire pardonner, de m'avancer quelques centaines de kilomètres plus loin. J'accepte volontier, pas du tout convaincu par cette route à trafic trop stressante pour mon feeling. A la bifurcation, soulagé, je retrouve enfin un paysage plus calme avec le soir venu, un village et des hôtes accueillants. Jusqu'au moment où un type pas commode sort de nulle part et me demande de dormir à la police, pour ma sécurité. Il ne m'inspire pas confiance du tout celui-là. Il finit d'ailleurs par se mettre tous les voisins à dos. 15 minutes plus tard, c'est le souk. Il revient accompagné d'un flic qui déboule en motocross, les yeux rouges, totalement bourré, m'arrachant mon appareil photo des mains sous prétexte que je lui tire le portrait. Mon appareil en otage, j'ai plus trop l'choix... Je pédale jusqu'au poste où il me dépasse en trombe, s'éjecte de sa bécane, se plante au milieu d'la route, soufflant à pleins poumons dans son sifflet strident. D'un doigt tendu vindicatif, le cowboy au cerveau imbibé d'alcool m'ordonne de m'arrêter en bord de route. Un quart d'heure plus tard, le commandant illettré débarque à son tour. Il épluche mon passeport d'un air ignare, puis note péniblement mon nom sur un bout d'papier qu'il égare déjà. Il passe en revue toutes mes photos, une à une, me posant, juste pour se distraire, une foule de questions. De retour au village, j'intègre enfin la petite chambre que mes hôtes m'ont gentiment préparé à l'arrière de la boutique. J'y déballe toutes mes affaires... Mais la nuit tombée, les 2 flics réapparaissent, m'ordonnent de tout replier, et m'indiquent une seconde fois la direction du poste. Le vélo sous clé, leur voiture démarre pour me conduire à 20 kilomètres de là, dans un hôtel qu'ils m'offrent gracieusement. Arrivé dans la bourgade, assis face à un autre supérieur, les promesses d'hôtel se volatilisent rapidement pour un logement imposé... à la caserne. Mais leurs manières et mensonges ne m'impressionnent guère. Je leurs tiens si bien tête qu'ils finissent par téléphoner à un autre supérieur qui me renvoie au village, case départ, leurs filant un délicieux savon au passage. Sans doute désespéré, le supérieur me sert une dernière salve: voilà qu'il essaye maintenant de m'impressionner à coup de rictus façon psychopathe, les globes oculaires sortant des orbites, comme dans un mauvais Vandamme. Espèce de racaille, je lui ricane à la face... Après cet ultime divertissement, alors que tout le monde dort déjà, je savoure enfin le calme du village et ma petite chambre poussiéreuse si accueillante.