Phil, l'escapade africaine

Ucuma - safari préhistorique

03/09/2015

Happé par ce faible courant qui m'aspire vers la montagne, mes 2 roues bifurquent pour un détour improvisé du côté des 2300 mètres. Une grosse pierre ronde pas si loin de la route se met à bouger: indifférente, une tribu de babouins me zieute à peine, préférant sans doute se dorer la pilule au soleil. Le safari commence. Tout heureux, je repars en sifflotant un vieil air de Daktari casé dans un coin de ma tête depuis l'enfance. Le paysage se métamorphose et je ne sens guère les montées tant j'observe, avide, les moindres détails du spectacle. Mon regard plonge dans cet enchevêtrement bordélique de boules de granite difformes, de blocs de quartz, de pics pierreux pointés vers le ciel. Les épineux menacent, les cactus maigrelets attendent impatiemment les premières pluies. Les baobabs, imposantes molaires posées à l'envers sur la terre, racines alenguies vers l'azur, s'imaginent en pieds d'éléphants boursouflés, ridés, avachis. Sous cette douce lumière, ces colosses bizarroïdes prennent des teintes cuivrées, aux reflets parfois rougeâtres. Je n'ai d'yeux que pour tous ces sommets qui gravitent autour de ma caboche, de plus en plus nombreux, et cette bouteille d'eau glacée qu'un automobiliste me tend en faisant demi-tour. Après chaque grimpette, un nouveau plateau infini m'attend, me fixant dans un autre tableau surprenant. D'énormes masses granitiques surgissent de partout, rondes, lisses, gris-bleu, tel de gigantesques crânes de dinosaures qui percent la croûte terrestre. A mesure que ma barbe pousse, les lumières deviennent de plus en plus rasantes, les herbes fauves. Mais quand les éclairs bouleversent le décor, la montagne face à moi vire soudain au violet, noyant les eucalyptus au lointain dans une brume presque surréaliste.