Phil, l'escapade africaine

Quissanga - la piste foutue et le camion

04/07/2016

Bonne nouvelle: la capitainerie du port m'annonce qu'un cargo en direction des Comores arrive fin de semaine prochaine. Parfait ça... Avec une semaine devant moi, je décide d'une escapade vers Vila do Ibo, belle bourgade typique située sur une île de l'archipel des Quirimbas. Pour changer un peu, mais aussi pour une question de flânerie et de changement de rythme, je m'y rends en transports locaux, par un itinéraire indirect de pistes parallèles au goudron. Parti tard de Pemba, je descends juste de mon deuxième chapas qui me largue devant un petit marché de brousse. Ici, tout se déroule par étape. L'endroit a l'air de se figer un rien et quelques véhicules passent, mais pas dans la bonne direction. Déjà 2 heures que j'attends. Alors que je grimpe enfin dans un autre minibus, le chauffeur me dit de descendre et de prendre le camion qui vient juste de nous doubler. "Direct pour Quissanga !" me pointe-t-il du doigt. Voilà. Encore quelques enjambées pataudes et j'y suis. Je me retrouve dans ce camion bâché rustique plein à craquer, assis sur un sac de je-sais-pas-quoi, au beau milieu des marchandises, des trucs et des gens. Puis l'aventure commence. Je regarde la piste totalement défoncée, crevassée, ravinée par les pluies, ensablée par endroits. Les regards fusent. Après un certain temps, un des passagers me trouve une place sur un des p'tits bancs en bois le long de la bâche, histoire de me cramponner à la structure. Ballotté en tout sens, plusieurs fois, j'ai l'impression que le camion va verser sur le flanc. La suspension est tellement molle... Pendant que les mobylettes nous dépassent à toute allure et que l'on respire la poussière à plein pif, le chauffeur négocie chaque trou d'sable au ralenti. Parfois, les roues butent sur un obstacle, le moteur cale, et l'assistant doit descendre pour le réanimer de l'extérieur, manuellement. Je regarde les passagers qui s'amusent comme moi de la situation. Un type en face de moi transporte un énorme carton d'oeufs frais sur ces genoux. Je n'arrive pas à comprendre. Après 5 heures de progression lente mais intense, le chauffeur amical me largue en pleine nuit au débarcadère des pêcheurs. "Je passe vers l'île aussi demain, me dit-il en rallumant l'moteur. J'ai une boutique à Ibo." Puis, il me laisse dans les mains du gardien qui me tanne déjà pour du pognon. Alors que je plante la tente devant sa maison, il me passe le "capitaine" du lieu qui veut me parler au téléphone, histoire de déjà discuter prix. Il me prend vraiment pour un gringo et me réclame 10 fois la somme pour la traversée de demain. Pas question de tomber dans l'panneau du touriste au portefeuille chargé: "je trouverai un gentil pêcheur." Sans doute par pitié pour mon haleine putride, le gardien s'interrompt de manger, me proposant finalement un peu de son riz. Mais lorsque je lui tends le reste du plat, il jette le restant aux chats, comme si j'étais le plus grand des pestiférés. Bon, c'est parfois comme ça...