Phil, l'escapade africaine

Matselagabedi - drogué du point d'interrogation

06/03/2016

Dans un village pas loin de Francistown, je retrouve Roman, mon cycliste frenchie chéri préféré, avec ses éternels problèmes de vélo tout pourri. A nous 2, on forme un couple un peu con, genre Beavis and Butthead, traînant nos gommes vers des aventures lentes, sans réelle définition de temps. Le mec végète depuis un mois dans cette famille où il passe la plupart des journées à batailler dans la cour avec les gamins et à charrier sa compagne, qui lui fout stupidement des doigts dans l'oreille pour le réveiller. Là, il est sur le point de quitter, m'annonce-t-il. Nouveau départ pour Roman. Dans tout voyage à vélo, par nécessité, on recherche toujours l'intensité, construisant ses histoires d'amour avec force. Puis on décide de tout plaquer pour retourner dans le bain de la superficialité, des instants fugaces, futiles, les rencontres qui ne riment à rien. Les gens te fatiguent avec toujours ces mêmes questions sans imagination qu'ils te posent à propos de ton bête voyage. Tu n'a plus vraiment envie d'répondre, tu te sens idiot, l'oeil aguard, vagabond. Tu erres juste dans le vaste décor. Tu cherches à nouveau l'étincelle qui finira par te brûler, la "chose" qui te feras chavirer. Peut-être mieux, peut-être pas... Vas savoir? Le point d'interrogation devient ton voyage, ta recherche, tu t'en retrouves prisonnier, éternel insatisfait... Cette liberté que tu savoures tous les jours, t'en as jamais assez. Elle te vas comme un gant, elle te captive, t'hypnotise, te capture... et tu finis par en devenir l'esclave. Avide. A vide... Mais toujours avec ce sentiment d'éternité. Et tu t'rends compte que rien ne sera plus comme avant, que tu n'regardes plus les gens de la même façon, que tu n'es plus adapté à cette vie normale qui t'fais lamentablement chier. Addicted. T'es devenu un drogué du point d'interrogation, celui qui te fait progresser d'un point à un autre, et "sluguer" sur la route à en répendre ta bave.