Phil, l'escapade africaine

Nacala A Velha - l'océan de pleine lune

21/06/2016

Après 10 jours d'arrêt pas brillants à Nacala en vue de trouver un bateau pour Madagascar ou les Comores, je reprends mon itinéraire en zigzags vers d'autres ports plus au nord. Hors goudron, j'avance vers quelques aventures, distillant les plaisirs vers les petites pistes côtières qui n'existent pas sur ma carte. A 14 heures, 30 kilomètres au compteur, je préfère écouter mon corps, pas au top de sa forme. Je stoppe déjà pour la nuit à Nacala A Velha, bourgade aux airs perdus du bord de mer. Le "take away" de Mohammed, le somalien sympa de la place, me semble un bon QG pour me r'taper l'estomac plus ou moins en douceur. Accoudé au comptoir devant un bout d'poulet même pas chaud, je repense à mes 10 jours d'arrêt à Nacala porto: j'ai même pas été foutu d'voir la plage... Mais je fais quoi dans la vie ? Il est temps de rattraper le temps perdu. En bas de la route, un chemin tout foutu mène à la baie. Quelques enfants s'amusent à courir dans la mer à côté d'un ponton tout cassé qui a fini d'exister. Juste en face, un bar-hôtel où la clientèle n'a pas vraiment l'air de s'bousculer. Et pour cause "l'établissement est fermé" me dit une passante. Mais le patron apparaît 5 minutes plus tard, vire le cadenas d'la grille, et m'autorise volontiers à placer la tente sur la terrasse bétonnée d'une des chambres, face à la petite plage négligée. Il m'accompagne ensuite en voiture au commissariat, histoire de me faire enregistrer. Là, j'arrive en plein moment chaud. Dans la salle de réunion, une fliquette énorme assène des coups de ceinture en cuir à un pauvre homme qui hurle sous ses assauts. Hystérique, elle braille et rigole à pleins poumons. Pour se divertir un peu, ses collègues décident de lui prêter mains fortes, et transforment la punition en séance de correction collective. Au même moment, le regard amusé, le chef de service vient me serrer la pince. Peut-être veut-il me souhaiter la bienvenue... Pour me remettre de cette horreur, je m'enfuis au kiosque de Mohammed. Je lui commande un truc bien chimique à base de "poloni", une sorte de saucisson mou rose fluo dont tout l'monde raffole. Ah ouais, c'est vraiment chimique... Puis, dans le calme des petites rues désertes un soir de solstice d'hiver, je retourne pas à pas vers ma petite maison verte. Mes yeux se fixent sur la mer au loin, phosphorescente comme dans un vieux clip de Bowie. En bas, à part la sono qui diffuse du zouk à fond et quelques putes qui rôdent dans les parages, c'est toujours le calme plat. A 4 heures du mat, la pleine lune me réveille tel un spot dans la face à travers la toile. Puis, il y a le chant des pêcheurs qui s'éloignent du rivage, rythmé par le ressac de l'océan et la pagaie qui se fond dans les flots.