Six jours à attendre ce bateau en provenance de Brazza. Retardé. Encore retardé. Six jours au pays des curés à glander, à peine visiter, entre brochettes de gésiers à l'ombre d'un manguier, bénédictions de repas gargantuesques, et diarrhée du genre qui te colle au matelas...
Il est 6 heures du matin quand la pirogue accoste à Mossaka. Mes pieds foulent le sable gris-blanc de la petite avenue du port, ralentissant déjà mon rythme...
Ce matin, Firmin est déjà posté devant la télé qui diffuse un reportage sur 2 aventuriers en campement dans le Serengeti, en Tanzanie. Tiens, justement, je voulais me rendre dans les parages...
J'éteins à peine la lampe de cette piaule pourrie envahie de fourmis et de poussière, que j'entends gratouiller dans un coin d'la pièce. Frontale. Je vois un truc bouger vers le plafond, genre une queue d'souris. J'augmente la puissance. Tiens, ça brille... Oui, ses 2 yeux brillent dans la nuit...
Après toute cette savanne, je me délecte de ce bout d'cochon sauvage-manioc du petit resto local. Au diocèse d'Owando, renseigné par Moïse pour passer une nuit paisible et gratos, personne ne répond. Sur la façade, une plaque étrange indique qu'un cycliste polonais du nom de Nowak, le même nom que ma grand-mère, a effectué un tour d'Afrique à vélo de 1931 à 1936, en passant par ici...
"Trop de sable" me dit-on. La piste de 130 km vers Ewo semble un véritable enfer pour mon vélo de nouveau chargé à stock. Après 4 km, la latérite se dégrade déjà et finit par me décrocher une sacoche. Bref, je n'ai pas encore vu le sable que j'empoigne mon guidon pour faire volte-face vers le goudron...
Là, je ne m'attendais pas à ça. Eric, le big boss suédois du parc, m'emmène au coeur de la réserve avec son autre ami suédois pour partager son week-end. Tu parles que je pouvais tracer la piste à vélo... C'est bourré d'buffles dans c'coin d'savanne...
Comme à l'aller, on ne verra rien de la réserve. Le mec appuye sur l'accélérateur en guise de frime, et cette fois, il pète un truc au moteur. Taré va... Je l'aurais parié, c'est la panne...
Je m'doutais que ce petit coin au nord de l'équateur respirait l'aventure. Eric, le nouveau directeur suédois un peu stoïc du parc d d'Odzala, me donne rendez-vous dans son bureau à 7 heures du mat. Et sous ses bons conseils, me voici parti sur cette piste touffue, naturelle et étroite, vers le Gabon, au beau milieu du territoire des gorilles...
C'est à l'équateur que je stoppe ma trajectoire en tout droit: j'opte maintenant pour quelques zigzags vers le parc naturel d'Odzala. Dans ce village désert, je mâchouille ce pain-sardine sans conviction. Observant petits lézards, papillons et araignées bizarres, ma salive n'imprègne guère cette nourriture trop fade que je porte à la bouche. Sans doute cette canicule qui m'en prive...